Partager la publication "Bruxelles 2016 / Evian 1938 : un même NON à l’accueil des réfugiés"
Ils sont des millions à fuir la guerre en Syrie et en Irak, dont des familles entières. Face à cette catastrophe politique et humanitaire, les pays européens sont incapables de se coordonner et de proposer des solutions légales de passage et un accueil digne de ce nom. Ou plutôt, ils refusent cet accueil.
Pour la seule Syrie, on compte environ 8 millions de déplacés à l’intérieur du pays et 4 millions de réfugiés principalement dans les pays limitrophes (Liban, Turquie, Jordanie). Au Liban, par exemple, ces derniers représentent 20 % de la population. Sauf dans une certaine mesure l’Allemagne, au moment où Angela Merkel a ouvert les portes, tous les autres pays européens, à un degré ou à un autre, refuse d’en accueillir un nombre significatif.
Au fur et à mesure que se ferment ainsi les frontières européennes, des passeurs proposent, pour des sommes astronomiques, des places sur des bateaux qui chavirent en mer, des camps se créent près des frontières, dans lesquels les gens vivent dans des conditions déplorables. Par exemple, à la frontière gréco-macédonienne où plus de 10 000 personnes « vivent » dans des conditions sanitaires et humaines inacceptables.
Face à cela, l’Union européenne conclut, le 18 mars à Bruxelles, un accord avec la Turquie, pays où on sait que les droits de l’homme sont fort peu respectés, dont le gouvernement mène la guerre contre les ressortissants kurdes et musèle l’opposition, accord qui propose une relance du processus d’adhésion à l’Union européenne.
En contrepartie on renverra en Turquie, déclaré « pays tiers sûr », des demandeurs d’asile dont on n’aura éventuellement même pas examiné la demande. Au mépris de la convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés, dont la Turquie n’est d’ailleurs même pas signataire !
Cela rappelle ce qui s’est passé avant la seconde guerre mondiale, fin 38, lors de la Conférence d’Evian dont on préfère ne pas trop parler, et dont j’ai découvert l’existence à cette occasion.
Devant l’afflux de réfugiés allemands et autrichiens, pour l’essentiel juifs – l’Allemagne nazie avait annexé l’Autriche en mars – les Etats-Unis, qui avaient à peine entrouverts leurs frontières, appellent à une conférence à Evian, réunissant Etats-Unis, pays d’Europe et d’Amérique latine.
Trente-deux pays répondent à l’appel. Mais après 10 jours de discussion, les Etats remettent la question entre les mains d’un « comité international des réfugiés » ; celui-ci ne peut décider aucun gouvernement à accueillir officiellement les réfugiés. Ceux-ci restent donc, pour l’essentiel, livrés à eux-mêmes ou ponctuellement assistés par des personnalités isolées ou des organismes d’aide, à la merci totale des passeurs. Ou contraints de rester où ils sont et de mourir assassinés !
On revoit cela, avec effarement, aujourd’hui.
Références :
Sur l’accord avec la Turquie
Le Monde, 19/04/16 – Migrants : pacte sans gloire entre l’Union européenne et la Turquie
Gisti – Accord Union européenne – Turquie : Externaliser pour mettre fin au droit d’asile
Sur la conférence d’Evian
Emission « mémoires vives » de la Fondation pour la mémoire de la Shoah du 13/11/2011
Un lien vers un article de Catherine Nicault, 1994 – L’abandon des Juifs avant la Shoah :
la France et la conférence d’Évian (1994)
C est effrayant comme l humanitė semble avoir peu de mémoire….