Après 1945, la communauté juive italienne a perdu un cinquième de sa population, ses
biens ont été spoliés et confisqués. Nous avons vu aussi que le passé fasciste a rapidement été enfoui sous les décombres de la guerre au nom de l ‘intérêt national (loi Taglietti de 1946) et que la spécificité de la Shoah organisée par les Allemands et les Italiens n’est pas reconnue. En effet jusque dans les années 2000, une confusion s’opère dans la mémoire collective entre déportation politique et déportation raciale, au profit des internés et déportés politiques résistants antifascistes. Aucune revendication mémorielle ne se fait de la part de la communauté, elle-même divisée sur cette question. Il faut attendre les années 1990 pour que l’opinion se réveille sur la question du génocide. Les lieux de mémoire spécifiques apparaissent à partir des années 2010 : pierres d’achoppement à Rome en 2012, musées et mémoriaux comme le Quai 21 à Milan en 2013, ou la fondation-musée de la Shoah à Rome en 2018.
En 1945 il subsiste environ 29 400 Juifs (sur 45 millions d’habitants), dont quelques milliers venant de Lybie, d’Egypte, de Tunisie (en raison de la décolonisation et des expulsions) ou de Hongrie. On peut aussi citer le groupe de paysans de San Nicandro dans les Pouilles qui, sous la conduite d’une sorte de gourou, s’affirmèrent Juifs dès 1931 et se convertirent collectivement en 1946. Un petit nombre est resté en Italie, la majorité est partie créer un moshav*en Israël. On voit à ces chiffres qui ne cessent de décroître (27 400 en 2019 sur 59 millions d’Italiens) que la survie de la communauté est fragile.