Une lettre de 50 jeunes objecteurs à Netanyahu

Photo de militant pour la paix Rédigé par Maya.

Un communiqué de l’AFP est paru en France le 10 mars 2014, annonçant que 50 jeunes Israéliens refusaient de servir dans l’armée et avaient, le 8 mars, écrit au Premier ministre Netanyahu pour annoncer leur décision.
Ce mouvement généreux et courageux, fondé sur la défense des droits de l’homme et le refus de la colonisation, nous semble important à relayer, quelle que soit l’opinion de chacun sur l’objection de conscience, et il est à distinguer clairement de celui des ultra-othodoxes protestant contre la fin du privilège dont ils bénéficiaient (exemption de l’armée) et qu’on souhaiterait voir œuvrer contre la politique réactionnaire de la plupart des partis qui les représentent.

Le groupe d’objecteurs le plus important
dans l’histoire d’Israël depuis 2008

« Notre opposition à l’occupation des territoires palestiniens par l’armée israélienne constitue la principale raison de notre refus de servir », indique la lettre, publiée samedi 8 mars sur la page Facebook de l’organisation Yesh Gvul (Il y a une limite en hébreu).
Cette déclaration est parue également dans Kibush, où il est dit que « c’est le groupe le plus important dans l’histoire d’Israël de personnes refusant la conscription. C’est la première action de ce genre en cinq ans, mais elle succède à une longue tradition d’objection de conscience collective. »
Pour Kibush, le but de cette déclaration est de protester contre l’occupation des territoires palestiniens qui se poursuit, où « les droits de l’homme sont bafoués et des actes, définis par le droit international comme des crimes de guerre, sont perpétrés de façon quotidienne ».
Les signataires protestent aussi contre la façon dont l’armée influence la vie civile, « accentuant le sexisme, le militarisme, la violence, les inégalités et le racisme présents dans la société israélienne. »
Sont cités quelques signataires :

  • Mandy Cartner, signataire de 16 ans, de Tel Aviv, a déclaré : « Les actions de l’armée nous éloignent de la recherche d’une solution et de l’établissement de la paix, de la justice et de la sécurité. Mon refus est une manière d’exprimer mon opposition aux forfaits perpétrés quotidiennement en notre nom et malgré nous. »
  • Shaked Harari, un signataire âgé de 17 ans, de Bat Yam, a déclaré : « L’armée est au service des gens au pouvoir et non des civils, qui ne sont qu’un outil. Mes amis et moi refusons d’être de la chair à canon. »
  • Roni Lax, un signataire âgé de 20 ans, de Bnei Brak : « Nous sommes solidaires des jeunes ultra-orthodoxes et des jeunes Arabes, chrétiens et druzes, dont certains sont actuellement dans une prison militaire. »

Objecteurs israéliens sur Facebook

La DECLARATION

Une défense des droits de l’homme
et le refus de la colonisation

« Nous, citoyens de l’Etat d’Israël, sommes appelés au service militaire. Nous appelons les lecteurs de cette lettre à laisser de côté tout ce qu’ils ont toujours tenu pour allant de soi et à reconsidérer les implications du service militaire.

« Nous, soussignés, avons l’intention de refuser de servir dans l’armée et la principale raison de ce refus est notre opposition à l’occupation militaire des territoires palestiniens.
« Les Palestiniens des territoires occupés vivent sous l’autorité israélienne bien qu’ils n’aient jamais choisi de le faire et n’ont aucun recours légal pour influencer ce régime ou ses méthodes de prise de décision. Ce n’est ni égalitaire, ni juste. Dans ces territoires, les droits de l’homme sont bafoués et des actes définis selon le droit international comme des crimes de guerre sont perpétrés de façon quotidienne. Ceux-ci comprennent des assassinats (exécutions extra-judiciaires), la construction de colonies sur des terres occupées, des détentions administratives, des tortures, des punitions collectives et une répartition inégale de ressources comme l’électricité et l’eau.
« Toute forme de service militaire consolide le statu quo et, en conséquence, en accord avec notre conscience, nous ne pouvons prendre part à un système qui perpétue les actes mentionnés ci-dessus. Le problème en ce qui concerne l’armée ne commence ou ne finit pas par les dommages qu’elle inflige à la société palestinienne. Elle pénètre aussi la vie quotidienne dans la société israélienne: il façonne le système éducatif, le marché du travail, tandis qu’il alimente le racisme, la violence et les discriminations fondées sur l’ethnie, la nation ou le sexe.
« Nous refusons d’aider le système militaire en promouvant et en perpétuant la domination masculine. A notre avis, l’armée encourage un idéal masculin violent et militariste, selon lequel « la force est le droit« . Cet idéal est nuisible pour tous et particulièrement pour ceux qui ne s’y adaptent pas. De plus, nous nous opposons aux structures de pouvoir oppressives, discriminatoires et fortement marquées par le sexe dans l’armée elle-même.
« Nous refusons de faire de l’abandon de nos principes une condition pour être accepté dans notre société. Nous avons profondément réfléchi sur notre refus et nous restons fidèles à notre décision.
« Nous appelons nos pareils, ceux qui actuellement servent dans l’armée et/ou qui sont réservistes, et le grand public israélien en général, à reconsidérer leur position sur l’occupation, sur l’armée et sur le rôle des militaires dans la société civile.
« Nous croyons au pouvoir et à la capacité des civils à changer la réalité en vue du meilleur en créant une société plus belle et plus juste. Notre refus exprime cette conviction. »

Un mouvement récurrent inscrit
dans le mouvement Shministim

A remarquer :

  • Cette initiative s’inscrit dans un mouvement récurrent depuis 1970, celui de refus d’intégrer l’armée par des mouvements de jeunes, les Shministim qui, en 1970, ont envoyé une lettre au Premier ministre Golda Meir pour exprimer leur désaccord avec l’occupation de la Cisjordanie et de Gaza.
  • Ce mouvement de jeunes se comprend aussi dans le contexte plus large des mouvements de soldats réfractaires (Refuzniks, Yesh Gvul, Courage to refuse…), que nous présentons sur notre site et dont on trouve, en anglais, la liste sur Wikipedia, dans l’article Refusal to serve in the IDF.
  • Le caractère anti-machiste dont cet appel témoigne, et qui n’est pas sans nous sourire !
  • Le statut d’objecteur de conscience n’existe pas en Israël et iles appelés réfractaires passent des mois en prison. L’association New Profile, qui soutient les jeunes objecteurs, explique leurs difficultés dans une société militarisée à l’extrême (articles en hébreu et en anglais).

Informations, relais et soutiens

Après de nombreux intellectuels israéliens, les soutiens arrivent du monde entier. Ces jeunes ont ouvert une page Facebook « refusingIDF » sur laquelle il est possible de se tenir au courant de l’impact de leur mobilisation.

Page Facebook objecteurs

Sources et références

Sources sur l’article

  • La déclaration des jeunes objecteurs, traduite de l’hébreu en anglais, se trouve sur les sites New Profile et Kibush.
  • La déclaration des jeunes Israéliens en français (traduite de l’anglais par Yves Jardin) se trouve sur le site Palestine-18 (par. 3, après deux articles très intéressants publiés également dans Haaretz d’Hamira Hass et de Gidéon Levy publiés en anglais dans sur L’armée la plus morale du monde) (ci-dessus, traduits en français par Yves Jardin).
  • On trouve également une autre traduction en français sur le site des Femmes en noir.
  • Le Point du 17 mars mentionne les deux mouvements d’objecteurs.

Sites sur les mouvements d’opposition à l’armée
ou au service militaire dans les territoires occupés

  • Sur les Shministim : v. la fiche sur notre site Maclarema . Et aussi : les sites américains Common Dreams ou Mondoweiss. Ainsi, qu’en anglais, sur le site Jewish Voice for pace, un appel à soutenir ceux qui sont emprisonnés.
  • Sur les soldats réfractaires, v. le portail publié sur Maclarema et, sur Wikipedia, l’article Refusal to serve in the IDF.
  • Paru en 2008, v. aussi l’article de Karine Lamarche « Des mouvements pacifistes aux mouvements anti-occupation israéliens. Matériau pour une réflexion sur les mobilisations contre l’occupation de 1967 à nos jours » (Bulletin du Centre de recherche français à Jérusalem).
  • Sur Kibush, il se définit comme un Magazine de l’Occupation, avec pour but de fournir des analyses et des informations alternatives sur la situation dans les territoires palestiniens occupés, fondé sur la « certitude qu’une solution viable doit être basée sur la fin inconditionelle de l’occupation israélienne, selon les principes d’égalité, de justice et de respect mutuel ».

Photos de la page Facebook des jeunes objecteurs Conscientious Objectors Against the Occupation.

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