La question névralgique des colonies
implantées en Cisjordanie
Les colonies israéliennes implantées en Cisjordanie et à Jérusalem-Est depuis 1967 – qui continuent à s’étendre encore à l’heure actuelle – constituent un point névralgique qui entache la création d’un État palestinien viable *. Nous avons donc voulu en savoir un peu plus sur leur histoire.
A la suite de la guerre des Six-Jours, Israël occupe, au-delà de la Ligne verte *, la Cisjordanie, Gaza (évacué en 2005), le Sinaï (rendu en 1982), Jérusalem-Est et le Golan.
Dans ce billet, nous nous focaliserons sur la situation en Cisjordanie.
I. Un peu d’histoire
En 1995, les accords intérimaires d’Oslo ont subdivisé la Cisjordanie en trois types de zones :
- La zone A, correspondant à 18 % de la Cisjordanie, qui comprend la plupart des villes et la majorité de la population palestinienne et où l’Autorité palestinienne dispose de la plupart des pouvoirs gouvernementaux ;
- La zone B, correspondant à 22 % de la Cisjordanie, surtout composée de zones rurales et où la sécurité reste sous le contrôle des Israéliens,
- La zone C, correspondant à 60 % de la Cisjordanie, qui reste sous le contrôle presque total d’Israël. C’est dans cette zone que les colonies sont implantées, sauf quelques cas isolés.
En termes de population, les zones A et B comptent 2,4 millions de palestiniens alors que la zone C en compte 180 000.
Au début, le choix des lieux d’implantation des colonies a répondu davantage à des problèmes sécuritaires (plan Allon de 1967) : Israël veut se garantir à l’ouest de la Jordanie, au nord-ouest de la Syrie par le Golan.
Puis peu à peu on crée des colonies dans des régions peuplées, avec la volonté clairement annoncée d’étendre la population juive en Cisjordanie.
Les gouvernements successifs ont encouragé la création de colonies en accordant des avantages fiscaux aux colons.
Ceux-ci sont religieux ou laïques. Toutefois, le poids des religieux, notamment des plus extrémistes, s’est accentué au fil du temps et pèse dans un sens négatif par rapport à tout accord de paix.
Au regard du droit international, les colonies sont illégales. La IVe Convention de Genève, signée le 12 août 1949, qui porte « sur la protection des personnes civiles en temps de guerre », interdit à une puissance occupante, en son article 49, « tout transfert d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle ».
Suivant la composition des gouvernements, des pourparlers et des accords de paix, il y a eu accélération ou gel de la colonisation, avec notamment une accélération actuelle malgré les pourparlers en cours.
II. Conséquences
L’existence de ces colonies, qui demeurent des bastions emmurés, sécurisés, construits souvent sur des collines dominant les villages palestiniens, a bien sûr un fort impact sur la vie des populations arabes locales.
En 2008, un rapport du Bureau international du travail, qui porte « sur la situation des travailleurs des territoires arabes occupés », constatait * :
« Les colonies israéliennes dans les territoires arabes occupés utilisent des ressources en terre, en eau et autres dont les entreprises, les agriculteurs et les travailleurs palestiniens ne disposent pas. L’expansion continuelle des zones de colonisation, des infrastructures et du nombre de colons se traduit par une concurrence directe pour les ressources. Plus de 80 % des colonies sont établies complètement ou en partie sur des terres palestiniennes privées. »
Tout un réseau autoroutier réservé aux seuls Israéliens relie les colonies entre elles et avec Israël, morcelant la Cisjordanie.
III. Population
En termes de peuplement des colonies en Cisjordanie (hors Jérusalem), on est passé de 112 000 personnes en 1992 à 300 000 environ actuellement.
D’après B’Tselem, le « Centre d’information israélien pour les droits de l’homme dans les territoires occupés », il y avait fin 2012, en Cisjordanie, 125 colonies reconnues officiellement par le gouvernement israélien et une centaine de colonies non reconnues (de taille plus réduite, elles représenteraient environ 10 000 colons).
Les colonies et leurs terrains représentent environ 63 % de la zone C.
Ainsi, pour préserver la possibilité d’un accord de paix, il est urgent de stopper toute nouvelle colonisation. L’Union Européenne a rappelé cette position à Israël en ce début d’année 2014, et les Etats-Unis ont réaffirmé l’illégitimité des colonies.
Notes
- La carte des colonies en 1995 est extraite du site [Les clés du Moyen-Orient|http://www.lesclesdumoyenorient.com/-histoire-par-les-cartes-34-.html, qui comporte un dossier bien documenté sur la question des colonies).
- Le terme de Ligne verte s’applique à la ligne de démarcation datant de l’armistice de 1949 entre Israël et les pays arabes voisins (Syrie, Liban, Transjordanie, et Égypte), à la fin de la guerre israélo-arabe de 1948.
- Rapport du Bureau international du travail, p. 19.
- On peut consulter la carte interactive a été établie par le mouvement La Paix Maintenant.